Jeux d'écriture
Limité à 10 participant.es, l'organisateur donne les consignes quelques jours avant la date de la rencontre. Le but est d'écrire une histoire, sous la forme demandée (nouvelle, poème, dialogue etc...).
La rencontre, objet du partage, a lieu un samedi par mois au centre LGBTQ+ à 14h, et se tient en trois temps. Lecture des textes produits personnellement. Choix et écriture d'un nouveau texte sur place puis lecture. Choix de la prochaine consigne d'écriture pour la future séance.
Lors de l'atelier du 4 septembre, le thème était le Haiku avec les mots suivants : orage, éclair, sécheresse, étoile, vague, soleil, zénith, nuits chaudes, source, méduse.
Voici les nombreuses propositions des participantes et des participants :
L’orage gronde
|
Une vague étoile,
|
L’orage
|
Les éclairs
|
La sècheresse
|
Les étoiles
|
Les Vagues
|
Le soleil au Zenith
|
Les nuits chaudes
|
Une source
|
Les méduses
|
Vague
|
Méduse
|
Soleil au zénith
|
Éclairs 1
|
Éclairs 2
|
Étoile
|
Nuit chaude
|
Et voici un texte libre sur le même thème:
Orage
Il y a plusieurs heures maintenant qu’il pleut.
Une averse de bord de mer.
J’ai laissé toutes les portes ouvertes.
Tu sais que j’aime les pluies d’été.
Je laisse s’envoler les rideaux blancs, tu sais bien, ces rideaux qui étaient là, de partout, autour de nous.
Je regarde la mer. Noire. Immense. Inconditionnelle. Elle rugit.
C’est ce bruit là que tu aimais.
Le hurlement des vagues noires sur le sable invisible.
J’ai posé mes mains sur le balcon. J’ai attendu que les éléments se déchaînent. Pour me sentir frissonner, terrassée par cette ambiance électrique ; je suis certaine que de là où tu es, tu la sens aussi, cette tension de l’air qui ne demande qu’à se déchirer. A exploser.
Et cela vient. Doucement d’abord. Au loin, il y a ce craquement imperceptible des éléments. Mon regard se fond sur cet horizon noir, cette attente des décharges qui viennent du fond de la nuit.
Et c’est là, dans ce moment intense, au moment même où le premier éclair déchire le ciel, que je te vois enfin. Dans les plis de ta robe blanche, celle que tu portais souvent dans nos soirées de bord de mer.
De tes cheveux magnifiques, glissent des feux d’artifice, d’une blancheur extrême.
Au bout de tes doigts, s’allongent des fuseaux immenses qui écartent la nuit et éteignent les étoiles.
C’est dans ce dernier cri du ciel que je te retrouve, même si je ne peux t’oublier.
Que je te revois, enfin, pleine et entière, dans la grâce absolue de ce moment de lumière.
Lors d'un autre atelier, le thème était : "une rencontre dans le milieu LGBT ou Queer".
Voici 4 textes qui en sont issus :
1er texte
Hello toi qui lira cette missive. Je te demanderai de bien vouloir la faire suivre à ma famille pour les prévenir que je vais bien et que je suis très heureux.
Si tu lis cette lettre, je me présente, je m'appelle Rob, et mon nom de famille est Hinson. Je viens d’une petite ville des bords de Méditerranée appelée Nice...
J’étais parti en bateau avec quelques amis lorsque nous entendîmes au loin des chants envoûtants qui nous attirèrent irrésistiblement vers les berges d'une petite île.
« You are a dancing queen, young and sweet, only seventeen.... »
Devenu incontrôlable, car tout l'équipage envoûté, avait lâché la barre du bateau et nous nous échouâmes sur la plage.
La musique de plus en plus forte nous attira tel un aimant. Des lumières colorées accompagnaient au loin cette musique.
Tout à coup, une créature immense, chaussée de spectaculaires chaussures à talons démesurés, coiffée d'une perruque blonde pailletée et au visage rigoureusement maquillé apparut. Elle s'approcha de nous avec un sourire radieux et rassurant et nous entraîna sur une piste de danse posée sur le sable.
Sur cette piste de danse, un univers incroyable surgit. Des Apollon sensuels et aux corps humides et sculptés, des femmes voluptueuses et extatiques, des corps androgynes pour lesquels nous ne pouvions déterminer le genre.
Des garçons embrassaient fougueusement d'autres garçons, des filles enlaçaient d'autres filles, tout ça au rythme de ces musiques envoûtantes.
Mais toutes ces personnes avaient ce point commun : sur leur visage se lisait un sentiment de liberté, de bonheur et de bien-être absolu. Aucun jugement, aucun regard ou commentaire malveillant, juste la liberté.
Aussi, ce jour-là, pour la première fois de ma vie, je sentais que j'avais enfin trouvé ma place, cet endroit où je pouvais être complètement moi, et cette île de « Kouir » serait mon nouveau chez moi.
Alors toi qui a lu cette bouteille, dis bien à ceux que j'aime que je vais bien, que je suis heureux dans ce lieu où je peux enfin être MOI.
ROB
2e texte : Colocataires
Je suis dans cette chambre sombre, j’écris à la bougie. J’écris un peu trop, tous les soirs.
Je m’imagine qu’il lit ce que j’écris. Lui, c’est un ami en colocation avec moi dans cette petite ville glaciale, perdue au bord des plages du Nord de l’Angleterre.
Au départ ce fut une rencontre qui aurait pu sembler très banale, au restaurant universitaire de Strasbourg. Un beau blond aux yeux bleus-gris, barbu, totalement inaccessible. Et de façon incroyable il est venu vers moi. Nous nous sommes découvert un intérêt commun pour le jonglage et les écoles de cirque. Un garçon attachant et décalé, qui m’avait proposé, dès notre rencontre, de jongler avec lui. De m’étourdir de son cannabis avec lui. De parler des soirées entières dans sa petite chambre d’étudiant. A jongler et à fumer.
Pour lui, très vite, j’ai annulé un stage à San Francisco. J’ai annulé une colocation de rêve avec deux beaux véliplanchistes allemands et espagnols. J’ai tout annulé, pour le rejoindre en Angleterre. Parce qu’il me l’a proposé, alors je l’ai suivi. C’est comme s'il me l’avait ordonné, et que moi, dans cet amour fou où j’étais soudainement de lui, jamais je n’aurais pu, rien, refuser.
Avec lui, nous avons rencontré cette petite rousse frêle aux yeux verts, dans la rue, qui baise avec lui en ce moment dans la chambre d’à côté. Cette fille, je l’entends crier, hurler à travers les murs. Je sais qu’elle aime ce sexe énorme, toujours turgescent le matin, au petit déjeuner, qu’il promène sous ses caleçons trop larges, devant mon visage hébété, en préparant son café, lorsque nous sommes seuls, tous les deux.
Plus elle crie, plus j’appuie sur mon stylo-plume, et plus je ralentis mon écriture. Les traits de mes lettres deviennent de plus en plus larges dans les pages de ce vieux carnet jaune.
Et puis cela cesse. Il a joui.
J’ai levé ma plume.
Elle ouvre la porte, ma porte, elle a un simple tee-shirt, elle n’a pas mis de culotte, elle me dit : je vais acheter des croissants. Je vous laisse tous les deux…
Frédéric rentre dans ma chambre, il m’a surpris. Lui aussi porte un tee-shirt, lui non plus ne porte pas de caleçon ; son énorme sexe est ballant, et surtout, souvenir indélébile, luisant de sperme. Il goutte encore. Mais le plus incroyable, ce que mon esprit conscient n’arrive pas à réaliser, c’est qu’il s’approche de moi. Il s’approche de mon lit.
Il s’assoit, à côté de moi, son sexe étale. Il s’allonge, progressivement, doucement, me demande si ça va. Je n’arrive pas à répondre. J’ai presque l’impression que de la bave coule sur le côté de mes lèvres. Que mes yeux sont exorbités, aussi parce que je n’arrive pas à contrôler mon érection. Et ma seule issue pour cela, c’est de me retourner. Alors je me retourne, je suis sur le ventre, et je lui dit que ça va, non ils n’ont pas trop fait de bruit, oui c’est sympa qu’elle puisse savoir où acheter des croissants dans cette petite ville perdue. Ma bouche essaye d’articuler, mon esprit essaye de se vider, mais une torpeur extrême s’est emparée de moi. Il ne se passera rien, jamais. Jamais rien pendant six mois, pendant des années, des années d’amitié, qui n’ont jamais cessé. Tout comme cette torpeur, qui ne cessera jamais. Cette torpeur et ce désir, toujours inassouvi. Frustration et désir mêlés.
3e texte : Gentleman
C’est le premier juin. Il se croit en août ce mois à la con. Mes talons s’enfoncent dans le bitume surchauffé. Pas grave mais moche. Je vais encore avoir l’air négligé. Pour me redonner contenance, je cherche mon rouge à lèvres dans le fouillis de mon sac. La camelote a fondu au fond. J’ai maintenant les mains rouge carmin, et les talons pourris. Quoi d’autre ? Je cherche une vitrine pour contrôler mon apparence. La rue est vide. Les gens sont en train d’agoniser dans leurs gourbis. Mon image me renvoie celle d’une pute sans envergure et décoiffée. J’ai envie de mourir. Mes prothèses me gênent. Le poids. Je me sens sale. J’ai l’impression de sentir la chatte négligée. Je continue ma route en me déhanchant gaiement. Un type m’interpelle. Un Anglais. Il me demande où se trouve la rue des travestis. Le con. Je lui réponds de ma voix de stentor. Il sourit comme un âne. Je lui propose une totale pour 100 balles. Il accepte.
J’enclenche le ventilateur. L’appartement sent le renard. Mon lit est bien fait. Je mets de la musique, les stones. Pas fort. Douglas me tripote le cul. Ma mini-jupe glisse au sol. J’ôte mon teeshirt, mon soutien-gorge. Ses mains douces massent mes seins d’une drôle de manière. J’adore. Il sait faire le type. Sa bouche sent le café. Elle est belle. Bien dessinée. Elle se pose sur ma poitrine. Je tremble comme une feuille. Son parfum est d’ambre. Je le respire à pleins poumons. Il a la quarantaine, tout en muscles, la barbe de trois jours, une légère calvitie. J’enlève ma culotte fétiche, celle avec des fausses hanches. Je le met à poil en trois gestes. Et là, stupeur, incompréhension, Douglas est une femme, une chatte proprette entre les jambes me fait de l’œil. Je regarde le mec nana, une petite cicatrice sous la poitrine signe l’ablation. Il est en extase devant mon minou. Je comprends que c’est la première fois qu’il voit une trans. Je ne sais que faire. Il m’embrasse en réponse à mes muettes questions. Je me laisse faire. Il est partout à la fois. Je jouis. Je veux qu’il reste avec moi. Je veux l’épouser. Je le veux tout entier pour moi. Mon apollon castré me parle et je l’écoute. Je m’abandonne à ses caresses. Je meurs. Ses mots sont de miel. Son pelage est exquis. Son attention est celle d’un vrai gentleman. Douglas Kingston ne partira pas. Je le sais intimement. Tous mes clignotants sont au vert. Lou Kingston, ça sonne...
4e texte
Elle marchait à pas lent, se dirigeant avec grâce et légèreté chez Moun, une boite courue d’alors. Elle était svelte, grande, sculpturale. Sa peau chocolat était exaltée par un souple tailleur blanc en mousseline dont la généreuse échancrure laissait entrevoir une poitrine puissante et ferme. Ses cheveux, coupés court, soulignaient parfaitement l’ovale de son visage et la perfection de ses traits. Ses longs cils réhaussaient le mystère de ses grands yeux d’ébènes. Ses lèvres charnues était magnifiée par un rouge corail subtilement appliqué.
J’étais assise au comptoir, trinquant à la promesse d’un bel été qui s’annonçait avec deux copines récemment en couple, quand elle se présenta à mon regard. Je fus immédiatement scotché à elle et comme un setter sentant une proie, je ne bougeais plus, oubliant mes deux tourterelles et mon verre de Spritz.
Ma belle amazone alla droit devant elle sans autre intérêt que de se rendre directement à une petite table où l’attendait visiblement avec impatience une laideronne avec un corps de sumo, une matrone au nez retroussé prête à jeter de l’huile brulante sur tout intru malvenu et une jeune femme brune, menue et charmante que j’avais ciblée auparavant.
Ma noire Déesse serait-elle déjà maquée avec la jolie brunette ?
Dans ma tête, j’imagine à une vitesse folle tous les scénarios possibles qui ont mis ces femmes en relation mais aussi les stratégies envisageables pour entrer en contact avec cette beauté et les chances d’arriver à mon but : l’amener à mon lit…
Mes deux amoureuses constatant que je les avais lâchées, se manifestèrent par des Hum, hum, Hou Hou, Heyyy qui m’obligèrent à revenir vers elles.
Je bredouillais alors quelques mots stupides qui trahissaient mon émoi et tentait par convenance de revenir vers elles mais l’intérêt n’y était plus.
Ces deux pipelettes allaient commencer à m’ennuyer et la pensée de passer une partie de la soirée avec elles prenait un goût d’ennui.
La belle tigresse envahissant tous mes radars, je n’étais plus apte à reprendre le dessus ni à honorer socialement le temps de partage qu’on s’était donné avec mes deux énamourées. Je ne pouvais pas les lâcher, je devais les donc câbler et leur soufflait en quelques mots la cause de mon trouble.
Elles se retournèrent d’un seul chef puis revinrent vers moi les yeux exorbités en s’exclamant « mais c’est… ». Une vive explosion retentit à ce moment qui me réveillât. J’étais couchée sur une banquette rouge où visiblement je m’étais endormie. La bouche pâteuse, je tentais de me lever et me disais « mes rêves finissent toujours trop tôt ».
Lors de l'atelier d'écriture du 18 mars, le sujet était le suivant "Que vous inspire ce portrait ?"

Portrait de femme...
Mon Dieu, que je suis lasse de poser pour ce peintre maniaque, depuis des jours et des jours, sous son regard un rien concupiscent... Je suis sans cesse ankylosée.
Quand je pense qu'il faut endurer cette torture pour faire plaisir à Père, tout cela afin d'avoir un portrait décent à montrer à mes éventueles futurs maris!
Lorsqu'on me présente, tour à tour, les différents visages peints de ces promis, cela ne me donne guère envie de me marier! Leurs familles sont peut-être appariées aux nôtres, possèdent les quartiers de noblesse requis, la richesse souhaitée, mais quels visages disgracieux, quelles tristes mines ! Quand ils sont jeunes, il ne faut pas se plaindre, mais c'est loin d'être toujours le cas.
Moi qui ne rêve que de déambuler dans le parc de notre château, de me rendre dans la forêt proche, cheveux au vent, escortée de mes chères suivantes, et de ma cousine Emma, tant aimée ! De jouer, rire, me rafraîchir à la fontaine, de tremper mes pieds dans l'eau glacée du torrent !
Quand le peintre me dit que j'ai une physionomie manquant de gaieté, j'ai envie de lui répondre : "Si vous deviez vous marier bientôt, perdre votre liberté, renoncer à votre jeunesse, vous enterrer vivante dans des pièces sombres et froides avec un mari affreux, lointain et désagréable, auriez-vous le sourir aux lèvres ?"
Et je serre les miennes, me retenant de lui sauter dessus, de m'enfuir, ou même de le mordre sauvagement ! Hélas, mon rang, ma condition et mon sexe ne le permettent pas....
J'ai constaté, au fil des ans, que ma mère se montrait, elle, docile, obéissante, dévouée à son cher mari... et était si malheureuse !
Le même destin m'attend... quelle triste époque pour les jeunes filles !
Lors de l'atelier d'écriture du 18 février, le sujet était le suivant "Écrivez en alexandrin , un texte de 12 vers ayant pour thème le chiffre 12".
Voici les texte composés par un participant et une participante :
A 12 ans ma virginité s’est envolée
Sur les 12 coups de midi un seul coup a suffi
Au confessionnal j’ai rencontré le mâle
Mon rêve lubrique lui a donné la trique
12 ave Maria ne suffirent pas
A le suivre dans la sacristie il m’invita
Comme par miracle sa soutane s’envola
De sous- vêtements il n’en avait pas
A bien secouer ses clochettes il m’invita
Te fais pas prier tu ne le regretteras pas
Merci Maria pour cette découverte là
Alleluia le paradis est bien là
Sachez que dans cet atelier prolifique
Ce sujet fort justement académique
N’a pas fourni d’imaginaire lubrique
À mon esprit tourmenté et diarrhéique.
Des alexandrins? Vous me voyez sceptique
Alexandre le gland, héros hellénique
À l’origine de ce mot sympathique
Me hérisse d’un dégoût mythologique
Désolée, je déteste la Grèce antique
Avec son lot de légendes chaotiques
Je préfère les nombres et statistiques
La beauté d’un bilan comptable typique
Tenez, prenez le chiffre emblématique
Douze, l’imposante beauté esthétique
De cette merveille de l’arithmétique
Me procure une jouissance biblique